Seule la poésie pouvait prendre en charge cette âpre figure de marin majorquin amoureux de sa barque, de la mer, dont la rudesse s'avère pleine de pudeur et d'une trendresse inexprimable. Au moment où, exilé dans la maison de sa fille, puis hospitalisé, ce taiseux s'éteint, le poème réinvente, dans la proximité d'une mère aussi rêche que son homme, l'enfance qui fera d'Antonia Vicens d'abord une des plus importantes romancières de la langue catalane, puis à l'occasion de cette douloureuse plongée dans l'enfance, une poète unaniment saluée. Lovely (2009) est son premier livre de poésie traduit en français.

 

 

 

14 euros


 

Et ma mère disait :

Il marche raide. Comme s’il gouvernait le vent.

Dommage qu’il ne sache pas garder ses vêtements. Toi

tu dois être plus alerte Antònia

ne lâche jamais ce qui t’appartient.

 

Et le rouge à lèvres coulait sur son menton

comme le sang

                         glisse

sur les jambes des femmes.